Exploration du cadre de la thérapie avec Jean-François Michaud, gestionnaire chez Familio, Marie-Josée Courval, travailleuse sociale ainsi que Dr. Alexandre Francisco, psychologue.
Familio: votre clinique en santé mentale et services sociaux.
Bienvenue tout le monde au premier podcast de Famillio, qui est une collaboration extraordinaire avec Alexandre Francisco et Marie-Josée Courval.
Objectifs et importance du podcast
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Speaker
Famillio ont un réseau clinique interdisciplinaire en santé mentale et services sociaux.
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Speaker
Puis, ça fait cinq ans qu'on existe, puis à travers les années, on a fait plusieurs activités qui étaient dédiées aux professionnels, qui faisaient soutenir la pratique privée. Puis le cadre a fait partie des formations et des thèmes qu'on a abordés à plusieurs reprises à travers les années.
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Speaker
Puis, ça a toujours été un sujet qui a mobilisé les équipes, qui a amené beaucoup de questions, puis on trouvait ça dommage que souvent ça se perdait après l'atelier. Fait qu'on s'est dit pourquoi pas un podcast? Puis aujourd'hui, c'est ça qu'on fait, on enregistre notre premier podcast avec Marie-Josée et Alexandre, qui vise à poser des réflexions, à amener des pistes de solutions, à se questionner pour être capable de continuer sa pratique puis d'en sortir grandir.
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Speaker
Donc, je vais laisser Alexandre et Marie-Josée se présenter, puis on commence ça médiatement. Tu me laisses aller.
Présentations des intervenants
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Speaker
Donc, Marie-Josée, je suis travailleuse sociale de formation. J'ai une vingtaine d'années, moi, de pratique, principalement en milieu hospitalier, clinique ambulatoire, et depuis quelques années en clinique privée aussi, entre autres chez familiaux.
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Speaker
Moi, j'ai vu à peu près toute ma carrière des individus et leur famille. J'ai plongé dans le milieu hospitalier, j'ai travaillé en cancéros, soins palliatifs auprès des familles, en pédopsychiatrie aussi. Donc, j'ai une approche, moi, de groupe et de famille principalement.
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Speaker
Et je fais beaucoup de supervision individuelle depuis plusieurs années aussi et de groupe auprès des professionnels psychosociaux, mais aussi auprès d'équipes interne, entre autres en hôpital de jour pour adolescents, psychiatrie adulte, etc.
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Speaker
Non, la barre est haute. Alors, moi, c'est Alexandre. Je suis psychologue depuis 1998. Essentiellement, j'ai toujours travaillé dans le système public, donc à soigner ou à essayer de soigner des patients polytraumatisés, donc des psychopathologies sévères, donc des personnes qui souffrent de troubles de personnalité, des patients schizophrèmes, de psychoses, des troubles narcissiques identitaires.
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Speaker
La chance que j'ai eue, c'est que mes patients m'ont formé puisque j'ai eu la chance d'essayer de les aider. Donc, j'ai beaucoup appris avec eux. Puis, avec le temps, j'ai commencé à donner des formations, à monter des formations, à faire de la supervision un peu comme toi en individuels et des supervisions groupes dans différents organismes ou institutions comme les hôpitaux ou des CLSC. Et voilà, je suis très, très heureux de commencer ce Nessa Podcast aujourd'hui avec
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Speaker
Super, ben parlez-nous un peu dans le fond ce qui vous anime, puis pourquoi c'est important pour vous le cadre, puis comment ça se réalise dans le cadre de votre pratique.
Approches complémentaires et postures cliniques
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Speaker
Oui, puis peut-être on va aussi commencer à rencontrer brièvement pourquoi Marie-Josée et moi on se retourne aujourd'hui, dans le fond c'est un cadre de formation.
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Speaker
En fait, quand on revient quelques années en arrière, Alexandre était venu nous présenter dans un colloque en cancérologie. Moi, j'avais été fascinée de ton approche qui était très différente de la mienne. En même temps, je t'ai trouvé un vulgarisateur incroyable. J'ai été invitée par la suite dans mes communautés de pratique dans le réseau en cancéro.
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Speaker
C'est à partir de là et à partir de ce moment-là, on a fait différents projets où on s'est rendu compte, à travers notre collaboration, qu'on est deux obsédés de la posture clinique du cadre, n'est-ce pas? Et autant qu'on est très complémentaires dans nos approches, donc on est différents à plein plein plein de niveaux, autant que nos messages clés,
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Speaker
Les enseignements principaux sont à peu près les mêmes, mais dans des mots peut-être différents. Et on est différents, mais on fait pareil. Entre autres, ce que je me suis rendu compte à travers nos expériences de supervision. Moi, du moins, j'ai à peu près 80 % de mon travail qui se fait en supervision individuelle ou de groupe sur la posture, sur le cadre. Qu'est-ce qu'on fait? Les transgressions au cadre, c'est en fait un majeur.
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Speaker
de mon travail en supervision, puis je pense qu'il avait quelque chose de ça. Moi, je te suis à 100 000 à l'heure là-dessus, et j'ai l'impression qu'en guillemets, là, je passe mon temps en supervision à, en guillemets, là, à corriger la posture, à aller voir là où mon clinicien ou ma clinicienne soit en souffrance, puis c'est en corrigeant ou en aidant là où il a supervisé, à ajuster sa posture, que comme les résultats, on pourrait dire, viennent par la suite avec leur patient.
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Speaker
sans que je leur dise nécessairement quoi dire, ou quoi faire, ou faire certaines interventions, même si ça peut être le cas aussi. Fait que là-dessus, je pense qu'on est vraiment, c'est là, je pense qu'on a eu une rencontre entre nous deux. Et comme on ne parlait pas la même langue, on avait le même contenu. Exact. Les alters égaux, aux langages différents. Exact, c'est ça, c'est bien dit ça. Donc la question du cadre, la question du cadre est de la posture. La posture, ça pourrait être pour un autre podcast. Qui sait? Qui
Cadre thérapeutique: Importance et Adaptabilité
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Speaker
sait? C'est sûr, c'est une question.
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Speaker
Mais aujourd'hui, on va essayer, c'est une question qu'on ne fera pas le tour du cadre. On ne fera pas toute la question. C'est une vaste question, mais on va essayer quand même d'adresser des points essentiels, puis de réfléchir un peu à, bien, tu auront pu, on ne puisse laisser pas sur le mode d'une... Ce qui est intéressant, c'est qu'on va le faire sur un mode relationnel où on va échanger. Jean-François, tu vas intervenir aussi pour nous remettre à l'ordre, surtout moi.
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Speaker
Puis, je pense que ça pourrait être intéressant comme ça dans les échanges où on va faire émerger les demi-points qui nous apparaissent quand même essentiels dans la pratique de psychothérapie à travers la question du cadre. Parfait, allons-y. Parlez-nous de ce que ça veut dire pour vous le cadre. Bon, veux-tu commencer? Je vais voir. Écoute, le cadre...
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Speaker
Le cadre est essentiel dans la psychothérapie. Ce n'est pas une question d'on en mettu un ou on n'en mettu pas un. La question, c'est un élément central. Puis la version, je dirais pour y aller, pour plonger déjà, qu'est-ce que le cadre en psychothérapie, essentiellement,
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Speaker
Le cadre, c'est les conditions qui vont permettre le processus thérapeutique. Puis quand je dis ça, c'est vrai pour la thérapie systémique, c'est vrai pour la thérapie individuelle, c'est vrai pour la thérapie de groupe, c'est vrai pour toutes les sortes de cadres, les sortes de dispositifs qui existent. Le cadre, c'est ce qui permet
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Speaker
de développer une psychothérapie, ça donne les conditions qui vont permettre un processus thérapeutique. Donc, la question, elle est comme, c'est évidemment essentiel, on ne peut pas passer à côté de ça. Les grosses questions qui vous brûlent les lèvres, j'imagine, c'est quoi les conditions pour faire une psychothérapie? Puis là, c'est là, je trouve qu'on ouvre sur un sujet vaste, mais très, très important, c'est-à-dire les conditions
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Speaker
Puis on peut, on a notre préjugé, je vais dire ça préjugé théorique, c'est-à-dire que les conditions du corps, bien, il y a des choses qui vont être stables pendant toute la thérapie. Puis il y a une stabilité qui doit être là d'entrée de jeu, qui cohabite avec des conditions qui vont évoluer puis qui vont changer parce qu'on va s'ajuster, là c'est le mot-clé, la malléabilité du corps. C'est-à-dire qu'il faut qu'il soit malléable parce qu'il s'ajuste en fonction du patient.
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Speaker
Ça veut dire que d'une certaine façon, il y a un cadre pour chaque patient. Et même ce cadre-là va évoluer possiblement en cours de psychothérapie.
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Speaker
Et donc, évidemment, j'entends tout le temps des fois de critiques qui disent, mais oui, mais là, un cadre, il faut qu'il y ait des limites dans la thérapie. Évidemment, mais c'est pas parce qu'il y a des limites que ça empêche la maniabilité et l'ajustement de certaines conditions pour, ultimement, là, évidemment, moi, je suis de la presse psychodynamique, mais on peut se parler quand même.
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Speaker
dans différentes approches, ultimement pour que le patient puisse être en contact avec ses affects, faire une meilleure introspection. En psychanalyse, on appelle ça favoriser des processus de symbolisation. Donc, toute la question de l'introspection, faire des liens entre ses sentiments, ses pensées. Il y a toutes sortes d'expressions pour ça. La mentalisation a été réflexive. Donc, ultimement, c'est notre guide.
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Speaker
qui va nous aider à diriger un peu, à faire des ajustements pour favoriser. C'est quand même un facteur très important, la question de la réflexivité. Je ne sais pas si tu devrais ajouter quelque chose là-dessus.
Négociation du cadre avec les patients
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Speaker
Autre le fait que je suis 100 % d'accord, puis t'es venue, Alexandre, dans certains de mes groupes de supervision dans le réseau, puis je me souviens que c'était une question qui revenait. T'es venue nous présenter sur les troubles de personnalité, puis au final, je te souviens, on parlait du cadre.
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Speaker
Il y a des petites ailes qu'on va pouvoir faire bouger, et il faut s'ajuster parce que sinon, c'est pas possible. Il y a des petites ailes qu'on va pouvoir faire bouger, et il faut s'ajuster parce que sinon, c'est pas possible. Il y a des petites ailes qu'on va pouvoir faire bouger, et il faut s'ajuster parce que sinon, c'est pas possible. Il y a des petites ailes qu'on va pouvoir faire bouger, et il faut s'ajuster parce que sinon,
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Speaker
Ça ne peut pas fonctionner la même chose pour tout le monde. C'est impossible. On doit être dans la singularité. Exactement. Puis, maintenant, j'abondis sur les grandes règles. J'ai déjà utilisé une métaphore que j'ai déjà utilisée souvent. On pourrait dire les grandes règles, comme tu dis très bien, mais j'aime bien l'expression des petites règles. Ça, c'est un petit bijou, hein? Si on commence maintenant par les grandes règles, c'est que pour que le cadre clinique fonctionne bien, qu'il est au service du patient, il y a des règles qui ne doivent pas changer.
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Speaker
Exact. Donc, ça prend du non-changement dans le cadre pour pouvoir créer du changement. C'est un peu comme un paradoxe. Donc, il y a des choses qui ne changent pas, en tout cas qui changent très peu, c'est-à-dire par exemple juste l'heure du rendez-vous, le lieu. Imaginez une thérapie où la séance change de journée, change d'heure à chaque semaine qu'on changera de lieu. Vous voyez, ça crée déjà une instabilité, on a besoin d'une forme de stabilité.
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Speaker
Et donc, les métaphores que j'utilise souvent, c'est le terrain de tennis ou la patinoire de hockey, c'est-à-dire que dans un match de tennis, il y a des lignes, puis il y a un filet. Donc, si on veut, quand même, la métaphore est belle, si on veut avoir des bons échanges,
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Speaker
Il faut que le filet puis les lignes ne bougent pas. Imaginez des lignes mobiles au tennis. In, out. Non, non, out, in. Ça va être le chaos. Puis il n'y aura pas d'échanges. C'est la même chose. C'est la même chose avec la patinoire. Si on veut un match de hockey, ça va prendre des bandes. Si vous allez jouer sur un lac au Saguenay, vous allez partir en échappée pendant deux semaines. Il n'y a pas de bandes, donc vous allez avoir la rondelle, mais il n'y aura pas de jeu. Il n'y aura pas d'échanges avec les autres parce que vous n'êtes pas contraints. Ça prend des contraintes.
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Speaker
qui vont être au service du développement de la psychothérapie. Je trouve que c'est des belles métaphores qui illustrent comment le non-changement et la stabilité vont permettre quelque chose de dynamique, des échanges et de la créativité.
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Speaker
Marie-Josée, au niveau des grandes règles, comment tu les définis et comment tu les vois? Il y a des grandes règles, nos règles déontologiques. C'est un point de départ. On ne peut pas transgresser nos règles. En pratique privée, les gens nous payent.
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Speaker
C'est une règle. Les gens ne peuvent pas nous consulter et au final, changer les règles du jeu et nous dire, bien, moi, je ne te paie pas aujourd'hui. Finalement, tu n'as pas d'argent ou ce n'était pas intéressant la rencontre. C'est des grandes règles pour moi.
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Speaker
qui sont maintenues dans le temps qu'on ne pourra pas négocier. Il y a des petites règles qu'on va pouvoir négocier, comme par exemple un paiement. Si mon patient, mon client, ça fait un an qu'il consulte, il y a une fouleur de chevilles, il ne peut pas venir cet après-midi exceptionnellement, je vais pouvoir cansegraisser ma règle et dire, bien écoute, c'est exceptionnel. Et pour moi, les grandes règles,
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Speaker
sont maintenues dans le temps. Et c'est aussi pour moi très thérapeutique, les grandes règles. Parce que quand il y a transgression de ces règles, donc je commence à me sentir moi-même comme thérapeute pas bien, je constate des transgressions. Pour moi, c'est des stignos.
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Speaker
où je dois aller travailler l'aspect des règles avec la personne. Donc, le cadre, moi, me permet de savoir où j'en suis dans la relation thérapeutique avec les gens. Donc, pour moi, la grande règle, je vais constamment m'en servir. Donc, si j'ai envie, moi-même, de transgresser, ah, à fait pitié, par exemple, à l'argent, là. C'est un enjeu assez infricain qu'on rencontre avec les intervenants.
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Speaker
elle fait payer, elle n'a pas d'argent. Moi-même, je suis en train de vouloir transgresser mes propres règles de ne pas faire payer. Là, c'est un signal pour moi qu'il y a quelque chose dans la relation thérapeutique qui est en train de, je ne veux pas dire de déraper, mais pour moi, c'est un signal d'alarme.
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Speaker
Donc, toutes ces règles-là, ces grandes règles, entre autres, qui sont fixes, me donnent à moi un cadre aussi pour analyser thérapeutiquement ce qui est en train de se passer avec mon client. Ça, c'est tellement important parce que là, tu es en train de dire, si j'ai bien compris, le cadre, ce n'est pas juste pour le patient. Exact. Tout aussi utile et nécessaire pour le thérapeute. Puis là, ça amène comme un autre sujet, je trouve que tu es comme dans le sous-texte de ce que tu dis.
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Speaker
dans des transgressions, dans des bris de cordes, il y a le danger que l'on soit dans une philosophie où il faut mettre la limite. Des fois, je ne sais pas si tu as déjà vu ça, mais moi, j'ai vu, c'est comme quelque chose de punitif. Donc, ils vendent une punition, vous avez transgressé. Puis l'idée de mettre une limite et de dire, écoutez, on ne peut pas continuer si vous ne payez pas, ça va de soi.
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Speaker
Mais je pense que c'est passé à côté de l'essentiel parce que la limite est peut-être nécessaire, mais elle est insuffisante dans la mesure où si le cadre est transgressé, s'il y a un enjeu de cadre, mettons, on pourrait dire quelle belle opportunité de faire de la psychothérapie à propos de cette transgression-là. Pourquoi ça arrive à ce moment-là? Pourquoi c'est l'argent? Pourquoi c'est pas autre chose?
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Speaker
Donc, les enjeux qui vont être inévitablement, ils vont inévitablement se produire, ce n'est pas juste de recadrer les affaires et surtout, oui, cadrer aux méthodes limites, mais surtout se procéder du potentiel de symbolisation ou d'introspection. Hey, il fait le couple de fois, il arrive en retard, hein? Je me suis demandé qu'est-ce que ça voulait dire, ça. Tu sais, comme ça ouvre sur la réflexion, puis ça peut permettre, le patient, des fois, il a besoin d'utiliser le cadre.
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Speaker
Pour faire des liens, évidemment, ils ne planifient pas ça comme ça, mais je trouve que ça, c'est une affaire essentielle du cadre qu'on entend des fois un peu moins. On dit, il faut garder le cadre.
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Speaker
Puis il faut respecter les règles et on oublie tout le potentiel de réflexivité qu'il y a pour le patient et pour nous. Parce que des fois, c'est nous qui transgressons le cadre, on se dit, je fais-tu un ajustement là ou je suis en train dans le fond de gratifier quelque chose pour moi et non pour le patient là. Je trouve que ça me fait associer là-dessus sur l'importance de récupérer, de voir dans les choses d'une autre façon, je te dis d'une autre façon, c'est quoi le rapport du patient au cadre.
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Speaker
Il y a des gens qui vivent les cadres comme quelque chose de sécurisant. Moi, j'aime ça mon mardi matin. Je viens toujours voir en 9h30. Je sais, c'est dans ma routine. Des fois, ils vont dire ça. Puis il y en a d'autres, les cadres. C'est une persécution. Bon, c'est ben vous. Hein? Vous êtes toujours dans la même place. Vous ne pouvez rien dire. Il y a des choses qu'on ne peut pas faire. Donc, tout ça, pour moi, c'est du matériel thérapeutique qu'il a exploré. Puis on a parlé de différents éléments du grand cadre. Est-ce qu'il y en a d'autres éléments du grand cadre qui sont importants pour vous, qui vous apparaissent centrales?
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Speaker
Mais les petits trucs, les grandes règles, tu trouvais que ça ramenait pas mal de... Tu vois, à l'essentiel, c'est sûr qu'il y avait d'autres choses, mais je dirais que ça, ça place déjà les... Là, on a parlé des grandes règles, les petites règles. C'est quoi, les petites règles que vous voyez au quotidien, qui est une certaine forme d'adaptabilité qui peut être faite? Moi, je dirais, c'est un peu comme... C'est le punch de notre podcast, mais ça dépend en même temps.
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Speaker
Ça dépend toujours de l'approche. Évidemment, c'est la question de l'ajustement. C'est la question de la malléabilité. C'est les petites règles. Je dirais que tu ne joueras pas sur ce que je dis là. C'est la question, une principe de base, c'est de dire que pour que le patient puisse développer son introspection, ses processus de symbolisation, tout ça, on doit lui offrir des conditions.
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Speaker
Peut-être que je vais passer par un exemple. Un patient psychotique que j'ai eu, il y avait vraiment un grave troupe psychotique, j'y suis suivi longtemps, à une autre époque, pendant plusieurs, plusieurs années. Il était terrorisé, évidemment, par la rencontre avec l'autre. Donc, le standard, c'est 50 minutes, une séance par semaine.
00:17:13
Speaker
Lui-là, après 20 minutes, il n'était plus capable d'être en relation avec moi. OK? C'était trop pour lui. Donc, qu'est-ce qu'on a fait? Je lui fais ce cours. Qu'est-ce qu'on a fait? On est dans le fond, il faut faire des petites séances. T'es d'accord avec ça? Finalement, on a fait un dispositif, un cadre, trois fois 20 minutes par semaine.
00:17:34
Speaker
Ça, c'est comme des petites règles. Donc, on a d'habitude notre 50 minutes. Et là, il y a un ajustement pour qu'il puisse m'apprivoiser, pour qu'il puisse tolérer mon existence dans le même espace. J'ai fait un ajustement. Ça n'aurait peut-être plus pas marché non plus. Ce n'est pas parce qu'on fait un ajustement que ça va marcher. C'est qu'on fait l'ajustement, puis on vérifie après l'effet que ça a sur le patient, l'effet sur la psychothérapie. Des fois, j'ai mes étudiants, oui, mais si ça ne marche pas, qu'est-ce qui arrive?
00:18:00
Speaker
on corrige. C'est pas grave, on se réajuste. J'aime bien mieux quelqu'un qui s'essaye de faire des ajustements pis que ça marche pas, plutôt que quelqu'un qui reste dans une forme de rigidité pis qui essaye à rien. Donc je trouvais ça, c'est l'exemple qui est venu spontanément, trois fois vingt minutes, après c'est devenu une fois une demi-heure, pis on a fini après plusieurs années, un cinquante minutes. Est-ce que c'est l'idéal de faire les cinquante minutes? Non! L'idéal, le mieux, c'est l'ajustement au patient.
00:18:28
Speaker
Donc ça, je trouvais que c'était, je ne sais pas si tu veux m'en dire. En fait, qu'est-ce qui va fonctionner? Mais moi, dans mon rôle de superviseur, de personne de travailleurs sociaux, entre autres qui travaillent auprès des familles,
00:18:41
Speaker
En fait, le nerf de la guerre, c'est qui je vais voir?
Thérapie familiale et incertitude en pratique
00:18:45
Speaker
Comment je vais les voir? Parce que là, on a des parents qui amènent leur ado, qui amènent leur enfant. Est-ce qu'on les voit en famille? Est-ce que je vois les parents? Est-ce que je vois l'enfant? Est-ce que je vois l'adolescente? Parce qu'on a une demande au départ qui est, bien, je vais t'amener mon ado parce qu'ils m'écoutent pas puis ils sont révoltés.
00:19:05
Speaker
Fait que soigne ton adolescent. Mais tout le circuit de la demande, aller travailler, analyser les frontières, c'est un ajustement constant pour les intervenants qui travaillent en famille. C'est négocier le cadre. Parce qu'évidemment, si le parent veut que son ado soit réglé comme une voiture au garage,
00:19:29
Speaker
Mais ça se peut que ce n'est pas ça que je vais faire, mais je vais négocier, je vais travailler la souffrance du parent qui m'amène son ado. Donc, on est constamment dans un ajustement de camp. Et évidemment, ça va être ajusté en fonction d'une réflexion clinique.
00:19:44
Speaker
tout le temps. Et aussi, c'est une négociation, par exemple, avec l'adolescent qui dit, bien moi, j'ai 14 ans, je veux pas que tu parles à mes parents, mais en même temps, on a des parents très, très, très angoissés de l'autre bord de la porte qui payent aussi pour l'ado. Donc, comment on va faire avec notre ado pour, peut-être, négocier et avoir donné quelque chose à tes parents?
00:20:04
Speaker
Donc, il y a une négociation constante autour du cadre, mais il y a des choses que je ne ferais pas. Je ne vais pas voir nécessairement l'enfant de quatre ans qui est turbulent parce que ses parents, ils ont de la misère avec à la maison. Ils ont de la difficulté avec leur cadre.
00:20:19
Speaker
Donc, évidemment, moi, je vais aller placer, je vais réfléchir, qu'est-ce qui est le mieux? Est-ce que telle famille je vais les voir ensemble? Une famille extrêmement enchevêtrée. Peut-être que le besoin, c'est un besoin d'espace. Peut-être qu'on va s'organiser pour voir les enfants ou les parents dans un espace de parents sans avoir tout le monde. Donc, le cadre est constamment à négocier quand on travaille avec les familles comme ça.
00:20:44
Speaker
Et c'est une grande souffrance des intervenants parce qu'on se demande toujours est-ce que je fais la bonne affaire? Est-ce que ça serait préférable de voir telle ou telle personne? Le père n'est pas content.
00:20:56
Speaker
on peut se tromper, on va se faire ajuster. C'est super intéressant. Donc, il y a le doute aussi à l'intérieur du cadre qui habite le thérapeute. Puis, comment tu arrives à passer à travers ce doute-là? Parce que dans un contexte, dans un contexte, ça peut fonctionner. Dans l'autre nom, tu vas accepter de mettre une règle. L'autre fois, tu vas l'enlever à un client différent. Comment tu fais pour vivre à travers ça?
00:21:20
Speaker
Mais j'apprends ça, je pense que tu, avec ta question, tu viens de parler d'une grosse problématique. Je crois que les gens, qu'est-ce qui fait qu'on maintient un cadre rigide? C'est parce que ça nous sécurise, nous, justement, de ne pas avoir à se poser de questions ou à se tromper. Puis, pour moi, comment on s'en sort? Peut-être que c'est vrai, Alexandre, qu'on s'en sort jamais.
00:21:41
Speaker
On va toujours garder un doute, c'est sûr qu'il y a de l'expérience qui rentre à un moment donné, puis on se crée un confort, puis en s'écoutant nous-mêmes sur nos inconforts, on apprend. Mais pour moi, les aspects du cadre comme ça, ça passe par la supervision et la discussion. Trouver sa juste place, trouver le juste cadre, c'est pour ça en fait que c'est 80 % de notre travail de supervisor, parce que ça nous prend quelqu'un, un reflet puis une discussion pour réfléchir sur la juste place.
00:22:11
Speaker
Fait que c'est sûr que le soutien clinique va nous permettre de se retrouver dans un confort plus grand et de développer une expérience liée à ça. Mais si on reste dans quelque chose de rigide, c'est bien réconfortant, mais on risque de passer à côté de quelque chose. Tout à fait d'accord, puis ça t'amène à la question du tiers.
00:22:30
Speaker
J'affirme, je veux pas que j'aie d'accord, évidemment, mais c'est comme, on peut pas faire ce travail-là de psychothérapie sans qu'il y ait un tiers. Le tiers, c'est le superviseur, c'est le collègue, c'est l'ami qui va... C'est la personne qui va justement nous donner une autre perspective. Puis ça, c'est central. Qu'est-ce que tu as dit? Parce que sans le tiers, les pièges dans lesquels on peut tomber, puis on n'est pas à l'abri.
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Speaker
On peut avoir de l'expérience, on peut avoir de la confiance, on n'est jamais à l'abri. Et moi, quand je disais tantôt, on s'en sort jamais, c'est pas sur un mode pessimiste, c'est sur un mode que non seulement il ne faut pas s'en sortir du doute, il faut l'endrasser.
00:23:09
Speaker
Donc, on pourrait dire, je change le mot, c'est le doute, c'est l'incertitude. J'appelle ça l'incertitude fondamentale par rapport à ce qui se passe dans la tête de nos patients et même dans la nôtre. Des fois, je peux penser que je suis triste. Finalement, une heure après, je me rends compte que je suis bien fâché. Fait qu'imaginons qu'est-ce que c'est quand on essaie de deviner, d'imaginer c'est quoi les états intérieurs du patient, de tolérer l'incertitude. On va faire en sorte qu'on va garder notre sensibilité
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Speaker
puis qu'on va éviter de tomber dans une espèce de rigidité ou dans une certitude en disant « moi, je le connais mon patient ». La pire affaire qu'on peut entendre, c'est ça. Donc, pense que je le connais, je vais essayer ça, je le sais pas, et donc il y a doute pour moi, puis la tolérance aux doutes et à l'incertitude. Ça, ça fera un podcast sur la posture, hein, mais c'est un élément dans la posture qui est central. Donc oui, il y a le malaise, mais c'est un malaise qui est au service de la réflexivité puis de la relation.
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Speaker
Puis on a juste à penser à nous, mais je pense à mes patients qui souffrent de trop de personnalités, hein. Tu as connu ça, c'est sûr que tu as connu ça. La mère, elle arrive, elle dit « Moi, je suis la pire mère au monde. » Boy, qu'on n'a pas d'espace. Elle est convaincue. Ou bien qu'elle me regarde, elle dit « Je sais que vous pensez que je suis niaiseuse. »
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Speaker
on voit comment il n'y a pas d'espace parce qu'elle n'a pas… elle est dans la certitude. Donc, je trouvais que ça faisait associer sur le dernier point aussi dans ce que tu avais dit. Il y avait bien des choses importantes dans ce que tu disais. C'est aussi comment, quand ces choses-là arrivent, comment on peut récupérer ça pour faire la psychothérapie? À l'exemple de ta famille, comment ça se fait qu'on se stigne et qu'on négocie tellement sur tel enjeu?
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Speaker
Pourquoi c'est si important que tout le petit bonhomme de 4H soit en dessous de mon bureau? Exact. Et puis pourquoi? Vous êtes si inquiets. C'est pas l'idée qu'ils ont dévoilé une mauvaise raison, c'est juste qu'on peut toujours récupérer, je reviens encore, c'est parce qu'il y a un cadre. Fait que c'est ça. Fait que le cadre, ce que je comprends, c'est que le cadre évolue, il s'adapte à la réalité.
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Speaker
Règle générale, oui. Des fois, il peut être bien stable, bien longtemps. Ça dépend des patients. Moi, je fais de la psychothérapie de groupe. Il est assez constant, le cadre. On ne change pas la longueur de la thérapie. C'est un peu le même format. Ce qui va changer, c'est des échanges. Des fois, c'est stable. Je vais dire ça comme ça. Des fois, le cadre est silencieux.
00:25:32
Speaker
Puis des fois, il fait un petit peu plus de bruit. Si il y a un peu plus de bruit, c'est à nous de dire, OK, qu'est-ce qui ne fonctionne pas là. C'est comme si du cas par cas, il n'y aurait pas une règle générale. Mais des fois, quand on fait plusieurs ajustements, pendant que nous, on arrête d'en faire, puis il y a quelque chose d'autre qui émerge parce que le patient évolue, on se réajuste.
00:25:52
Speaker
Par exemple, comme un patient, je pense à une patiente que j'ai vue cette semaine, elle vient chaque semaine, à chaque deux semaines, puis là, ça va moins bien. J'ai dit à elle, vous savez quoi, on pourrait se voir à chaque semaine pendant 20 ans, je vois que ça c'est difficile. Elle a dit, je suis content que vous me le proposiez, j'aurais pas osé le demander.
00:26:16
Speaker
Non. Ça fait longtemps qu'on est stable, mais là, il y a eu cet ajustement-là. C'est comme un exemple, en tout cas, c'est tout récent. Ça arrive justement que c'est stable, puis ça peut changer, puis... Temporairement.
00:26:29
Speaker
Toujours en fonction des besoins du patient en outillement là, ou les conditions pour faire symboliser notre patient. Tantôt, avant qu'on commence le podcast, on a parlé de plein de choses, mais des choses qu'on avait discutées, qu'on n'a pas abordées encore aujourd'hui, c'est comment la société impacte le cadre, comment les choses.
Adaptations aux changements sociaux
00:26:46
Speaker
Il faut être à l'écoute aussi, pas juste de ce qui se passe chez nous comme thérapeute, pas juste ce qui se passe dans le bureau, mais ce qui se passe à l'extérieur du bureau. Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu?
00:26:55
Speaker
Tout à fait. Je suis content que tu poses la question parce que c'est un sujet qui m'intéresse depuis un bon moment. C'est la question. Je vais te donner l'idée, le principe, c'est de dire qu'un psychothérapeute ne peut pas être hors socius.
00:27:13
Speaker
Dans son bureau, il y a peut-être l'impression d'être tout seul, mais il y a toute une société qui l'entoure. Puis donc, la société, donc la sociologie, je ne suis pas un sociologue du tout, mais donc l'intérêt, du moins pour savoir c'est quoi qui se passe dans la société, impacte nécessairement notre cadre clinique puis notre pratique. Puis si vous n'êtes pas convaincu de ça, rappelez-vous de la COVID.
00:27:34
Speaker
Je veux dire, la COVID, là, on est passé... Ça a bouleversé nos cordes. Nous, dans le réseau, là, à chaque jour, il y avait un changement. On ne peut pas voir le patient, on peut le voir, oui, deux mètres de distance avec le masque, avec... Non, on va le faire en zoom. Le zoom fonctionne. Je veux dire, ça a été, en guillemets, une catastrophe au plan du cadre parce qu'on perdait les choses qui ne changent pas dans le cadre, les grandes règles.
00:27:57
Speaker
Même les grandes règles étaient bouleversées. Donc on voit, et tout le monde l'a connu, mais on voit tout de suite comment les changements sociaux dans ce cas-ci, la pandémie, viennent bouleverser, peuvent venir bouleverser. Je pense à un psychologue argentin qui a vécu la dictature dans les années, je ne veux pas trop m'avancer, des années 60-70 en Argentine.
00:28:20
Speaker
ils ajustaient leurs cordes. Si la police débarquait, ils arrêtaient évidemment les intellectuels, puis ils avaient ajusté son cadre pour arranger que si la police débarquait, son bureau de psy, en fait, ça ressemblait à un salon.
00:28:35
Speaker
Donc, quand les policiers arrivaient, ils disaient, bien, on est juste des amis. On discute, on prend le thé ensemble. Mais il n'y avait pas de divan, là. Vous voyez, comme en psychanalyse. Donc, l'idée, il y a des ajustements quand il y a des bouleversements sociaux. Et je pense qu'on est dans une époque où il y a des grands bouleversements sociaux. On appelle ça l'hyper-modernité. C'est-à-dire que, puis on pourrait en parler longtemps, ça va pas être un autre podcast, mais c'est l'idée de l'accélération du rythme de vie.
00:29:02
Speaker
la classe des technologies, la déshumanisation d'une certaine forme de déshumanisation. On peut parler, on pense à la crise climatique, mais on peut parler d'une certaine forme de médias sociaux.
00:29:15
Speaker
Il y a l'administratisation, n'est-ce pas, de nos pratiques. On parle des fois de ça, ça a un impact. Moi, je dis les statistiques que je dois faire à tous les jours à la minute près dans le réseau. Ça ne peut pas impacter ma pratique. Pendant ce temps-là, je ne suis pas en train de faire des podcasts, je ne suis pas en train de réfléchir avec un collègue. Donc, c'est juste quelques exemples plus ou moins dramatiques. Je trouve que l'impact de ça, c'est que ça crée... Écoutez, c'est le tédés hypothèse. Ça crée des nouvelles formes de souffrance.
00:29:45
Speaker
chez nos jeunes, chez les adultes, et donc des nouvelles formes de souffrance auxquelles nous, les intervenants de psychosociaux, on est à l'avant-garde, pas à l'avant-garde, on les voit arriver, là. Moi, j'ai des choses que je voyais pas il y a 25 ans dans mon bureau puis que maintenant c'est rendu quasiment norme.
00:30:01
Speaker
bien, ça veut dire que ça crée d'autres formes de souffrance et donc ça veut dire que ça va nous amener, ça nous amène déjà à ajuster notre cadre. Ça fait qu'on doit créer, être créatif pour trouver des dispositifs de soins qui vont tenir compte de ces nouvelles formes de souffrance, on pourrait dire qu'ils essentiellement tournent l'estime puis l'identité.
00:30:25
Speaker
des gens de notre époque, là. On a juste besoin de regarder la jeunesse, tu chopes de dehors, t'es bien placé, bien mieux placé que moi encore, parce que les enfants, la famille... Oui, les paradigmes changent. D'ailleurs, le cadre familial change beaucoup.
00:30:39
Speaker
l'aspect des réseaux sociaux, le temps d'écran, etc. C'est vraiment très très très présent, puis ça me fait penser ce que disait Alexandre, toute la pression aussi dans le réseau de la santé, parce qu'on est avec familiaux en privé, mais on est aussi dans le réseau de la santé, la pressurisation qui modifie le cadre, le manque de personnel, le temps,
00:31:02
Speaker
C'est comme si on avait le temps pour rien. Il y a même des cadres rigides qui s'installent tranquillement. C'est un peu de ça, d'ailleurs, dans les groupes. Les intervenants nous faisaient part quand t'es venu. Le nombre de rencontres très rigide, la pressurisation de sortir les gens des hôpitaux. Donc, le temps d'intervention, les objectifs d'intervention, les commandes des gestionnaires.
00:31:28
Speaker
C'est une pression énorme et comment prouver sa marge de manoeuvre et son propre cadre de travail quand on a un intervenant. Il faut être capable de se définir en ce qui est là. Il faut être capable de réfléchir à ça. Sinon, on se fait complètement happer dans une pression et une incohérence dans l'intervention aussi. Je suis tout à fait d'accord.
00:31:53
Speaker
Non, ça veut dire que non seulement ça a un impact sur le cadre avec le client, mais ça a un impact aussi sur le propre thérapeute, qui lui aussi, vu de la frustration, de la souffrance, a devoir s'adapter et a devoir évoluer et vivre même lui-même, peut-être, comme individu non pas juste comme thérapeute. Oui, et peut-être parfois transgresser les règles. Ah oui! C'est une certaine cohérence. Bien oui, on va dire au nom du patient. Avez-vous des exemples? Au nom de la compétence pénique, de la rigueur. Exactement.
00:32:23
Speaker
Oui, ça c'est central, parce qu'on voit l'enjeu, hein, c'est que, je vais dire ça comme ça, c'est des métacordes, des métacordes sociaux, c'est ce qu'organise, disons, comme par exemple à une autre époque, la religion catholique a organisé beaucoup, disons, la société. Mais on voit comment, disons par exemple, on prend l'exemple du système de santé, on a notre métacorde qui est le gouvernement, qui lui produit un autre cadre qui est, mettons, le système de santé.
00:32:48
Speaker
Et puis nous, notre cadre, il est intégré dans le système de santé. Quand il nous arrive avec la question des données probantes ou en disant que c'est juste 12 séances pour soigner un patient avec un trouble de personnalité, ça devient bien concret tout d'un coup, les organisateurs sociaux et l'impact que ça a. Donc, nous, c'est comme si on ne peut pas être, je vais dire ça comme ça, mais on ne peut pas être cliniciens sans faire un peu de politique.
00:33:11
Speaker
Si on ne s'occupe pas de la politique, la politique doit s'occuper de nous. Mais on dit qu'on défend, on ne lutte pas à armes égales. C'est comme un combat, je dirais, de tous les jours. C'est là qu'on voit les effets concrets dans notre bureau, comment on va se sentir nous comme intervenants.
00:33:30
Speaker
avec ce bagage-là, avec ces changements-là et les pressions qu'on peut recevoir. Mathilde et Marie-Josée, tantôt tu disais qu'il faut même, comme intervenant, des fois transgresser le cadre. C'est des exemples où tu as dû transgresser le cadre? Non, mais tu sais, quelque chose qui se raconte là.
00:33:51
Speaker
J'ai déjà entendu des gens parler, par exemple, de, entre autres, le nombre de rencontres de pourtui. Évidemment, dans le réseau des spécialistes en activité clinique, ils vont faire des suivis de dossiers, mais de trouver des marges, des voies de passage pour peut-être augmenter un nombre de rencontres dans une situation donnée, par exemple.
00:34:19
Speaker
pour des raisons cliniques et de rigueur ou en disant au gestionnaire ou au spécialiste en activité clinique de poursuivre par exemple avec un patient. C'est un exemple, j'ai déjà entendu parler de ça.
00:34:36
Speaker
C'est important quand tu dis que certains ne parlent pas de toi ou de moi, mais l'idée qu'on va le faire pour le patient, c'est pourquoi on fait un ajustement de cordes.
00:34:55
Speaker
Me tourne à l'exemple que tu aurais fictif, que tu as donné, c'est celui que le cadre, on parle beaucoup depuis tantôt que c'est nous qui construisons, mais c'est construit avec le patient. Déjà, je réinsiste là-dessus. Pourquoi? Parce que d'une certaine façon ou d'une façon certaine, tu as écouté ton patient.
00:35:12
Speaker
Donc, le patient, c'est aussi lui qui nous enseigne quel genre de cadre il a besoin. On parlait de ça tantôt avant qu'on commence le podcast, j'ai donné l'exemple de Freud. Il y a plein d'exemples dans notre pratique, mais si on écoute le patient, il va nous dire quel genre de cadre il a besoin. J'ai donné l'exemple de mon patient psychotique, il commence à décompenser après 20 minutes. Je pense que c'est clair que c'est trop pour lui.
00:35:34
Speaker
Et l'exemple qui venait, c'était celui de Freud, qui était très intervenant. Il intervenait beaucoup. Il était interventionniste avec sa fameuse patiente, Emma, puis il la touchait sur le front. Il essayait de diriger les échanges. Puis à un moment donné, à ce choc, il a dit, « Arrêtez de me toucher. Arrêtez de me dire quoi faire, puis faites juste m'écouter. » Donc, puis là, Freud, il a été la sagesse d'écouter.
00:36:04
Speaker
comment la patiente avait besoin de travailler en psychothérapie, puis elle a quand même mis la base de ce qui est encore tout à fait pertinent aujourd'hui, qui est quand on arrive en thérapie, allez-y avec ce qui vous vient. Bon oui, on a un objectif thérapeutique, on a fait une évaluation et tout ça, mais essentiellement le processus, c'est venir me parler de ce qui se passe en vous.
00:36:23
Speaker
C'est Freud qui a quand même été capable, mais grâce à Emma, sa passante, elle lui a dit voici le cadre dont j'ai besoin. Ça s'est généralisé en psychanalyse. Là, c'est un exemple historique, mais tout à fait encore pertinent. Je pense que c'est un peu la même chose que tu as fait.
00:36:38
Speaker
Tu as écouté ton patient, puis tu as ajusté le cadre en fonction de ça. Ça pour moi, les patients, c'est-à-dire qu'on se dit toujours, hein, Freud disait, je ne suis pas l'expert du patient, je suis l'expert de la méthode. Je trouvais que c'était de l'exemple et bon, puis on va le faire parce que dans notre éthique relationnelle et thérapeutique, on va se dire, ce n'est pas l'administratif qui va guider ma décision
Réflexion personnelle et interventions efficaces
00:36:59
Speaker
clinique. Oui, c'est ça, c'est comme super intéressant.
00:37:01
Speaker
Qu'est-ce que vous pensez qu'on devrait retenir de tous ces échanges-là en lien avec le cadre? C'est quoi les choses les plus importantes pour vous? L'essentiel maintenant? Oui, l'essentiel.
00:37:11
Speaker
Moi, mon essentiel, puis j'y reviens parce que je l'ai mentionné plus en début de la rencontre ensemble, c'est être à l'écoute de soi par rapport aux cadres nous permet des réflexions bien intéressantes et souvent des interventions plus rigoureuses et intéressantes. Par exemple,
00:37:35
Speaker
Pour moi, si je reprends l'exemple d'Alexandre sur la patinoire ou le terrain de tennis, je reprends le terrain de tennis surtout parce qu'il y a un filet entre les rues. L'espace, il est égal des deux côtés.
00:37:51
Speaker
Et c'est ça qu'on construit, c'est d'avoir chacun son espace pour moi avec le client, le patient ou la famille. Et à certains moments, je vais ressentir de la frustration, je vais ressentir des choses, des transgressions dans le cadre, je vais ressentir que je n'ai pas mon espace. Donc, c'est comme si les limites
00:38:11
Speaker
Les grandes lignes du terrain, c'est quand elles s'étaient tassées. Puis là, moi, mon espace devient tout petit. Ça, ça veut dire que je prends pas bien ma place, puis il faut replacer quelque chose dans le cadre. Puis ça, on le ressent. Puis c'est ce que les gens nous présentent en supervision, puis c'est ce que moi, je présente quand je vais en supervision. C'est là que je me sens coincée. Je me sens coincée par le père.
00:38:35
Speaker
Je me sens coincée dans la situation. J'interviens auprès de l'enfant, mais j'ai l'impression que je devrais faire. Je me sens pas bien. Donc, tout cet aspect d'espace sur le terrain, de s'écouter puis d'aller essayer de comprendre qu'est-ce qui est en train de se passer pour que je me sente comme ça. Et 90 % du temps, il y a un aspect de cadre, il y a un aspect de ma place, de ma posture qui est en jeu. Et moi, c'est autant le cadre
00:39:04
Speaker
Oui, objectivable, les règles qu'on met en place avec les gens, mais c'est dans le processus thérapeutique de s'écouter par rapport à ça et de replacer et surtout de se faire confier. Notre classe est importante comme thérapeute. Donc, on veut laisser la place à l'autre, mais on veut laisser la juste place à l'autre. Nous, on a une place aussi. Notre confort dans le cadre, il est super important. Ça, c'est un émenteur Monilkaïm qui nous disait
00:39:33
Speaker
Marie-Josée, je ne peux pas travailler si je ne suis pas confortable. Alors, quand j'ai juste un petit espace sur le terrain de tennis, si ça ne peut pas fonctionner, je n'ai aucune marge de manoeuvre. Puis, dans le sens inverse, je ne peux pas prendre toute la place. C'est ce que tu disais avec Fréde, entre autres, à un moment donné. Exact. C'est un échange, puis on a chacun notre... Donc, s'écouter, pour moi, c'est un aspect essentiel. C'est très bien dit, ça. Vraiment. Et puis, genre, ça inspire pas mal de choses quand tu parles comme ça.
00:40:01
Speaker
Ça ouvre aussi sur la... Parce que tu parles de supervision, hein? Ça ouvre aussi sur quand il y a de l'espace, il y a de la créativité qui est possible. Et donc, la créativité pour faire des ajustements. Donc, c'est dans la forme d'ajuster en fonction des besoins du patient, puis je trouve que ça ouvre sur la question de... Moi, comme tu disais tantôt en supervision, ça ouvre sur la question de quand ça marque... Quand on n'a pas d'espace, quand on a moins d'espace, en général, je dirais ça comme ça,
00:40:30
Speaker
Je sais pas si c'est dans ton expérience de supervision, mais pratiquement à chaque fois, quand mes supervisés... C'est vrai pour moi aussi, mais quand mes supervisés arrivent et qu'ils sont en souffrance et qu'eux n'ont pas d'espace avec leur patient, généralement, c'est qu'il y a quelque chose dans l'histoire du patient qui vient coller dans l'histoire de mon supervisé. Puis c'est à ce moment-là qu'ils vont passer des moments difficiles en supervision parce qu'ils vont connecter sur
00:41:00
Speaker
Je pense à une ancienne stagiaire qui avait rencontré un homme un peu plus vieux et qui était très dénigrant et qui arrivait donc de la misère à être empathique. Je fais ce recours évidemment, mais évidemment, elle a fait le lien qui lui rappelle son père. Elle n'avait pas vu ça comme ça. C'est un patient difficile, il ne m'écoute pas, il est bien dénigrant.
00:41:23
Speaker
Il a des bonnes chances. S'il souffre d'un taux mersique, c'est ça qui va arriver, mais quelque chose colle dans son histoire. Elle espère encore qu'il va changer.
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Speaker
Évidemment, ce n'est pas comme ça que ça va se passer. Donc, je trouve que ça, pour moi, comme on disait, c'est 80 % de la supervision. C'est aider aussi notre supervisé à s'écouter lui-même dans comment ça vient résonner dans son histoire. Ce n'est pas du travail facile, mais on est notre propre outil dans le cadre.
00:41:53
Speaker
On est notre propre outil, donc il faut qu'on soit prêt à travailler sur soi pour les moments où on prend trop de place ou les moments où on n'en prend pas assez. Quand on a la juste place, j'aime bien la juste place, je trouve que ça ouvre sur la créativité et donc sur les ajustements pour être capable de co-construire avec le patient des dispositifs, ajuster à lui le temps qu'il en a besoin. Wow, c'est super riche. Merci.
00:42:20
Speaker
Je pense que c'est une discussion ouverte aussi qu'on lance avec tout le monde. Si jamais il y a des commentaires, des réactions et des choses qu'on veut approfondir, t'sais, venez nous voir.
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Speaker
Parlez-nous-en puis on va voir s'il y a un autre podcast à faire sur un autre sujet ou comment qu'on est capable d'intégrer ça dans toutes les questions qu'on se pose parce que l'objectif derrière ça, c'est d'être ensemble. Vous l'avez dit, le cadre, ça se vit pas juste avec le client ou s'il faut avoir une tierce partie vers qui se référer, ben c'est le podcast, c'est un peu cette tierce partie-là qu'on offre à tout le monde. Revenez vers nous puis on va voir comment l'intégrer, comment qu'on est capable de répondre à toutes vos préoccupations et questions en lien avec votre cadre thérapeutique.